Être immigré(e) aux Émirats Arabes Unis : quelle identité dans un pays multiculturel ?

Composés à près de 89,00% d’immigrés et accueillant plus de 200 nationalités, les Émirats Arabes Unis répondent aujourd’hui à un modèle qualifié de multinational et multiculturel. Pourtant, dans un pays où la cohabitation et l’échange inter-communautés est plus que facilité, la construction d’une identité pour les immigrés peut, elle, s’avérer plus délicate. Enquête auprès de jeunes immigrés et émiriens sur leur conception de l’identité aux Émirats Arabes Unis.

Cadres et méthodes

Cette enquête s’appuie sur seize entretiens qualitatifs, de six femmes et dix hommes, dont douze immigrés et quatre locaux. La sélection s’est effectuée sur plusieurs critères : tous ont vécu aux Émirats Arabes Unis la plupart de leur vie ou y sont nés (parmi les immigrés, six y ont passé plus de 2/3 de leur vie, un la moitié, et cinq sont nés directement sur le territoire) ; tous ont entre 18 et 24 ans et sont étudiants (afin de faire ressortir les questionnements sur l’identité, qui surviennent le plus souvent à l’adolescence) ; tous sont issus d’horizons et de cultures diverses (européens, américains, asiatiques, africains et arabes. Cette dernière donnée permet notamment de percevoir si l’éloignement entre le pays d’origine et les Émirats Arabes Unis est un élément viable de différence entre les interrogés, notamment sur leur sentiment d’appartenance à la société émirienne) ; et tous vivent avec leur famille (permettant souvent de conserver un lien avec leur pays d’origine, par la transmission de traditions ou la pratique de la langue). Les locaux, eux, sont tous intégrés dans un groupe d’amis aux origines variables. La plupart de ces interrogés est issue d’un établissement international d’Abu Dhabi. Certains sont issus d’une enquête menée précédemment sur les pratiques durant le mois de Ramadan [1]. Chaque interrogé jouit d’une condition sociale confortable, dans la mesure où les familles doivent justifier d’une situation économique suffisante pour élever leurs enfants sur le territoire émirien, et que chacun d’entre eux fait des études supérieures aux Émirats Arabes Unis où à l’étranger (principalement aux États-Unis, au Royaume-Uni et au Canada).

Les Émirats Arabes Unis diffèrent totalement du modèle de l’État-nation européen du XIXème siècle, basé sur l’unicité via l’appartenance à des valeurs, des traditions et une culture communes. Après le départ des britanniques à la fin des années 1960, le pays déclare son indépendance le 2 décembre 1971. Peu industrialisé et urbanisé, il jouit cependant d’une économie florissante – grâce à ses réserves pétrolières importantes et son commerce de perles.

Conscients de leur place stratégique et de leur capacité de production, les Émirats Arabes Unis se lancent dans un développement spectaculaire, afin de devenir une nouvelle puissance mondiale. Pour cela, le pays s’appuie sur une main d’œuvre peu chère et nombreuse, directement venue du subcontinent indien (majoritairement indienne, pakistanaise, philippine, thaïlandaise et indonésienne), mais accueille aussi très rapidement une population qualifiée, à la fois arabe, européenne, américaine et asiatique. Pour Salma [2], émirienne : « C’est un peu bizarre d’être en minorité dans son propre pays, mais c’est à notre bénéfice. Tout le monde n’est pas capable d’assumer les responsabilités que les expatriés prennent, où faire le travail physique des ouvriers. Nous avons besoin de tous ces gens pour notre économie et pleinement construire notre pays ».

Les Émirats Arabes Unis gagnent en démographie très rapidement, jusqu’à atteindre près de 10 millions d’habitants en 2021 (contre seulement 300 000 en 1971). Cependant, derrière cette richesse multiculturelle, se cache une volonté forte de conserver l’identité locale, basée sur un certain privilège. En effet, la nationalité émirienne est l’une des plus difficile à acquérir dans le monde, et nécessite la révocation de la nationalité d’origine. Pour la résidence, le pays s’appuie sur un système de « donnant-donnant » : celle-ci ne peut être renouvelée – entre autres – qu’avec une activité économique stable (pour les adultes). Comme l’explique Rohan, indien installé avec sa famille à Abu Dhabi depuis 19 ans : « Lorsque je serai dans la vie active, je devrai travailler dur ou je ne pourrai pas rester ici ».

LES ÉMIRATS ARABES UNIS, UNE TERRE D’OPPORTUNITÉS

À l’instar de l’ouvrage Impossible Citizens : Dubai’s Indian Diaspora [3], cette enquête cherche à recueillir au plus près les sentiments des jeunes immigrés aux Émirats Arabes Unis. Ils évoluent tous dans un espace riche en rencontres et mélanges et développent des rapports à la citoyenneté différents. Certains se sentent complètement étrangers – malgré leur présence continue sur le territoire – alors que d’autres effacent certaines marques de leur culture d’origine pour s’imprégner des traditions locales. Pour d’autres, le cosmopolitisme des Émirats Arabes Unis leur donne une conception hors-normes de l’identité, globale et hybride. Ces « enfants internationaux » ne s’attachent pas à un lieu, un langage ou des traditions spécifiques : ils s’inspirent du mélange qui les a toujours entouré pour s’adapter.

Les raisons de la migration des interrogés sont semblables : « Mon père a eu une opportunité de travail ici il y a 15 ans, et toute la famille a suivi », s’exprime Awa, mauricienne. Kate, américaine installée ici depuis 16 ans avec ses parents, renchérit : « Ici, tu te fais vraiment beaucoup d’argent, et le confort de vie est exceptionnel, par rapport à n’importe quel autre pays ». « Mon grand-père a déménagé aux Émirats Arabes Unis à un moment où ils étaient en plein développement. C’était un temps crucial » ajoute Yasmin, libanaise née ici. Pour certains, les Émirats Arabes Unis sont aussi synonymes de tolérance et cohabitation : « C’est le pays dans le Golfe qui apparaissait comme le plus ouvert. On retrouve un ancrage fort de la religion et des traditions, mais il y a aussi une très grande ouverture, ce qui est plus facile en tant qu’Anglais pour s’intégrer », s’exprime Jack, ici depuis quatorze ans. « Dans ma vie personnelle, la culture des Émirats Arabes Unis a toujours été plus libre. C’est un mode de vie international. J’ai pu pratiquer ma culture d’origine ici sans être jugé, et prendre part aux cultures des autres également », termine Rohan.

Au-delà d’une opportunité professionnelle sans précédents, le pays a aussi permis à un grand nombre d’immigrés d’éviter une vie difficile dans leur pays d’origine. Pour Tariq, syrien né ici, « les Émirats m’ont sauvé d’une vie que je n’ai certes, jamais connue, mais qui paraissait inévitable sans ce processus d’immigration. Je suis syrien, et si ma famille n’avait pas déménagé à Abu Dhabi dans les années 1970, je serai probablement en train d’essayer de traverser la Méditerranée ». Ahmed, palestinien né ici, complète : « Regarde la condition actuelle de mon pays. Personne ne s’en sort, et je n’aurais surement pas été une exception si j’étais encore là-bas. ». À ce changement de trajectoire exceptionnel, s’ajoute aussi le confort des écoles et universités, comme en témoigne Rohan : « Je sais que mon université sera reconnue dans d’autres pays, et me donnera des opportunités de carrière que je n’aurais pas eues si j’étais resté en Inde ».

Plus particulièrement, le pays offre aussi une sécurité et une liberté, que soulignent la plupart des femmes interrogées. Israa, égyptienne née aux Émirats, commente : « La sécurité fonctionne dans deux sens. Déjà, par rapport à la communauté d’origine : en Égypte, j’aurais été jugée pour mes choix, pour ma tenue, pour mes fréquentations, même par des inconnus. Ici, chacun fait sa vie. Aussi, à Abu Dhabi, je peux sortir à n’importe quelle heure de la journée et dans n’importe quelle tenue, je sais que je n’aurai pas de problème. Par contre en Égypte, les choses auraient été très différentes… ». Kate renchérit : « C’est incroyable la liberté que l’on a en tant que femme ici. Je n’ai jamais senti aucune pression conservatrice ».

Dans les réponses, ce n’est ni l’aspect matériel, ni le mode de vie qui prévalent. Pour l’ensemble des immigrés interrogés, c’est avant tout l’apport personnel d’une vie dans un pays multiculturel qui rentre en jeu. « Tu sais, nous sommes amenés à vivre dans un monde de plus en plus mélangé, avec les migrations. Nous avons besoin de cohabiter ensemble. Et les Émirats nous apportent justement ces clés de compréhension de l’autre que l’on ne trouve nulle part ailleurs », explique Jack. « L’exposition [dans le sens exposure en anglais] est très importante. Tu acquiers vite un point de vue international, et une tolérance envers les autres ethnicités, nationalités, ou religions. C’est ce qui manque dans les modèles européens par exemple », s’exprime Jacob, autrichien. Pour Ilyès, libyen installé à Abu Dhabi depuis 11 ans, « grâce aux Émirats, je parle plusieurs langues, je connais plusieurs cultures, et j’ai des connaissances de partout. Cela n’aurait pas été possible dans un autre pays. ». En riant, Hamad, émirien, raconte une anecdote lors de son voyage en Europe : « Les panneaux de signalisation ne sont écrits que dans la langue du pays, et même pas en anglais. Tu t’en rends compte ? C’est fou ! ».

UNE PERCEPTION AMBIGUË DANS LA COMMUNAUTE D’ORIGINE

Si la plupart semble à l’aise avec ce modèle international et ce mélange de cultures, l’attachement au pays d’origine et la perception de sa communauté restent des points sensibles. Pour Tariq, bien que les Émirats Arabes Unis lui offrent la possibilité d’une vie meilleure, l’authenticité de son pays lui manque : « Le mode de vie est beaucoup plus simple en Syrie, les gens ont tendance à être naïfs mais très accueillants. Aux Émirats Arabes Unis, par exemple, une personne peut se vanter du nombre de voitures de luxe qu’elle a dans son garage ; en Syrie, les gens (avant la guerre) se vantaient de leurs fermes. ». Cette nostalgie du pays peut cependant n’être que fantasmée, la plupart n’ayant presque plus d’attaches avec cette terre : « Quand je suis retournée dans mon pays d’origine pour la première fois, j’’avais ce fantasme d’appartenance, qui n’existait pas en réalité. Je ne me suis pas senti chez moi, et j’ai finalement pris plus de recul », continue Tariq. « Quand on est né aux Émirats Arabes Unis et qu’on nous répète qu’on est Libanaise, Égyptienne ou Syrienne, on se fait une idée de notre « vraie » culture. Mais elle n’est qu’imaginaire, car on ne partage pas tout le reste » ajoute Israa.

Partiellement chez eux aux Émirats Arabes Unis, les immigrés interrogés ne le sont pas non plus dans leur culture d’origine. Au-delà d’un éloignement physique ou culturel, beaucoup ne s’y reconnaissent pas, notamment à cause de jugements. « Lorsque que je me rends dans mon pays, je me sens comme un étranger, un visiteur. C’est aussi parce que mes proches me répètent « Oh, c’est le retour de l’étranger ». C’est bizarre, car dans notre culture, c’est une fierté de vivre à l’étranger. Il y a une sorte de jalousie, et mes proches font exprès de me stigmatiser pour me rappeler que je ne suis plus à ma place ici » explique Rohan. Awa ajoute « C’est étrange quand on n’a pas vraiment d’attache avec sa culture d’origine. Quand je retourne à Maurice, je ne suis pas à l’aise pour parler en créole mauricien, inspiré du français. Je préfère parler anglais mais je loupe beaucoup de choses ». Le point des accents et du vocabulaire revient aussi très souvent pour les arabophones, qui tentent d’alterner entre dialecte émirien et dialecte d’origine (principalement levantin ou égyptien). « Quand je suis ici, j’essaye de ne pas parler aux autres avec mon accent égyptien. C’est ma manière de me sentir plus intégrée. Par contre, quand je vais en Égypte, j’ai plus de mal à me réadapter puisque je ne pratique plus. C’est difficile pour ma famille de l’accepter » explique Israa. « Il y a une chose de drôle, c’est que je ne me sens absolument pas émirati, et justement plus proche de ma culture d’origine, mais même mon peuple trouve mon accent et la façon dont je pratique les traditions très étranges. Tu sais, même ma mère parfois ne me comprend pas quand je parle arabe, puisque c’est un mélange de tous les accents que j’ai rencontrés dans un pays mixte comme celui-ci », ajoute Tariq.

L’image luxueuse que renvoient les Émirats Arabes Unis est toute aussi stigmatisante pour les interrogés : « Moi, je suis considérée comme un distributeur de billets. Un enfant de riches, qui a toujours tout eu dans la vie. Ma famille éloignée et certains de mes amis, restés là-bas, pensent qu’ici, tout le monde vit dans une tour, avec un garage rempli de Lamborghini et se rend au travail en chameau [rires] » explique Tariq. Rohan ajoute : « Ils répètent que je suis un privilégié, en oubliant toutes les difficultés auxquelles je fais aussi face. Il y a un sentiment de « il s’en sort mieux que nous », ce qui crée un décalage culturel fatigant. Ils attendent de moi que j’agisse différemment ». Sur cette question de privilège, Jacob souhaite ajouter : « En même temps, c’est un peu vrai. Bien que je sois plus ouvert, je regrette de ne pas avoir eu d’interactions avec d’autres classes sociales. La plupart des élèves des écoles internationales et des locaux sont plutôt très bien lotis sur le plan financier ». Les jugements et préjugés peuvent aussi se rapprocher d’un certain « exceptionnalisme » [4] qui plane sur la péninsule Arabique. Comme l’analyse Jack : « Il y a un sentiment d’émerveillement et de fascination, mais aussi de confusion. On évite d’aborder les questions des droits des femmes, de la démocratie ou des LGBTQ. Certains des préjugés sont vrais, mais la plupart sont faux ».

Finalement, cinq des douze immigrés interrogés se sentent totalement chez eux aux Émirats Arabes Unis, jusqu’à se sentir émiriens pour trois d’entre eux. Pour les autres, les Émirats Arabes Unis apparaissent plus comme une solution de repli, face à toutes les difficultés dont ils souffrent dans leur communauté d’origine : « Je n’ai pas d’autres endroits ou me sentir chez moi, à cause de cet éloignement et des jugements. Les Émirats apparaissent finalement comme ma maison » avoue Ahmed. Yasmin termine « Je me sens chez moi ici, mais je sais qu’un jour je vais partir, ce qui crée un sentiment très bizarre ».

FINALEMENT, LA CRÉATION D’UNE IDENTITÉ HYBRIDE

À ces difficultés par rapport à la communauté d’origine, s’ajoute le privilège des populations locales, qui crée un certain écart entre les jeunes interrogés. Ce privilège, bien que formé socialement, est aussi un mot d’ordre de la diplomatie culturelle et du récit national du pays, qui malgré la nécessité et l’envie d’un cosmopolitisme important, continue d’entretenir un fort nationalisme. Comme en témoignent Salma et Rachid, émiriens : « En tant que locaux, on nous donne la possibilité d’étudier gratuitement, on a des bourses, les soins médicaux gratuits… Tout est facilité pour nous ici, et on en est très reconnaissants ». Les immigrés témoignent aussi de cette différence assez flagrante. Pour Kate, « Les locaux ici vivent dans un monde à part, et sont très privilégiés ». Tariq, commente aussi timidement : « J’ai eu certaines mauvaises expériences ici et j’étais totalement impuissant. Les gens d’ici ont plus de pouvoir en raison de leur statut ».

Les démarches administratives récurrentes et les conditions pour l’obtention d’une résidence rendent elles aussi le sentiment d’appartenance moins fort. Comme en témoigne Awa : « Je me sentais définitivement chez moi, mais j’ai perdu ma résidence après mon départ pour l’université à l’étranger. Malgré mon attachement émotionnel aux Émirats, il n’y a plus de lien tangible à cause de ces démarches administratives lourdes. ». « Ce sentiment persistant de « je dois travailler dur et survivre ou je ne peux pas rester ici » atténue vraiment le sentiment d’appartenance que j’aimerais ressentir », ajoute Rohan. Tariq, plus nuancé, commente : « Les gens ici ne vous traitent jamais comme un étranger mais plutôt comme l’un des leurs […] En même temps, je suis traité comme n’importe qui d’autre qui vient d’arriver dans le pays, je dois toujours renouveler mon visa chaque année comme si je n’étais pas né ici. Il est également très difficile d’ouvrir un compte bancaire en tant qu’étudiant syrien car la plupart des banques nous interdisent strictement l’accès à leurs services et il y a beaucoup d’autres interdictions parce que j’ai un passeport syrien que je n’ai pas choisi, bien que je sois né ici ».

Au-delà de ces difficultés administratives, beaucoup – y compris des émiriens – mentionnent une culture locale unique, absolument inaccessible pour les immigrés. Hamad et Murad justifient cet héritage comme la nécessité de faire perdurer l’essence du pays : « Ce qui rend les Émirats très spéciaux, c’est que nous n’avons pas laissé les autres cultures nous affecter, mais nous nous sommes accrochés à notre culture pour nous assurer de la transmettre aux générations futures. ». Salma continue « Les traditions émiriennes ne sont pas comme les autres, elles doivent être pratiquées et transmises aux générations suivantes de manière continue pour éviter qu’elles ne se perdent avec les autres traditions auxquelles nous sommes exposés chaque jour […] Cependant, cette exposition multiculturelle a aussi permis aux pays de s’ouvrir sur la condition de la femme notamment ». La culture originelle et les traditions sont notamment partagées lors des grands rassemblements familiaux ou tribaux des émiriens.

Cette difficulté d’adaptation vis-à-vis de la communauté d’origine et cette exclusivité émirienne pousse le plus souvent les interrogés à « se créer une identité internationale », comme la nomme Israa. « Des fois je me détache simplement de ma culture d’origine, parce que j’en ai marre de ces jugements. Je perds en quelque sorte mon identité propre en devenant multiple », renchérit-elle. Les immigrés tentent donc de piocher dans plusieurs cultures et traditions, et de se construire une identité hybride : « Je ne me sens définitivement pas émiratie et je ne me sens pas forcément très mauricienne. Je me sens juste unique dans mon mélange de cultures », commente Awa. « Tu sais, quand on parle d’identité, on ne parle pas forcément d’une culture de rattachement. La plupart d’entre nous ont réussi à mélanger tous ces apports pour créer une identité unique », explique Jack. « Je ne me sens pas émirienne, mais je me sens à peine libanaise. Je suppose que j’ai lutté contre une sorte de crise d’identité la plupart de ma vie avec moi-même, pour devenir ce que je suis », avoue Waël, libanaise née ici.

Finalement, tous sont unanimes : si la culture et les traditions pèsent beaucoup dans la construction de l’identité, elles peuvent être multiples, et ne pas nécessairement appartenir à un pays. La culture émirienne leur a donné des clés de compréhension d’un monde multiple en religions, en nationalités, en traditions et en cultures, et ils ont su s’adapter à ces mouvements pour créer leur propre identité. Un modèle, qui selon certains, les amènera peut-être à être plus mobiles plus tard, pour reproduire le même schéma : « Tu sais, je suis perdu avec mon identité, mais je me présente toujours comme libyen. J’ai vécu dans tellement d’endroits que je n’ai pas l’intention d’avoir un seul chez-moi plus tard, ni pour mes enfants. C’est irréaliste pour moi », conclut Nouri, libyen installé à Abu Dhabi depuis bientôt 12 ans.

[1] https://cefas.cnrs.fr/spip.php?article900

[2] L’ensemble des prénoms des interrogés a été modifié, par souci d’anonymat.

[3] VORA, Neha, Impossible Citizens : Dubai’s Indian Diaspora, Durham and London : Duke University Press, 2013 .- 245 p.

[4] Voir l’ouvrage d’Ahmed KANNA, Neha VORA et Amélie LE RENARD, Beyond Exception : New Interpretations of the Arabian Peninsula, 2020.